Objectification et Momification- Miss Lilith
Silence et Cellophane
Il est là, debout, dans le coin de la pièce. Immobile. Il sait que ce n’est plus à lui de bouger.
Aujourd’hui, il ne sera pas un homme. Pas même un corps. Juste un objet. Un support. Une chose.
Car sous mon regard, il perd ses droits. Et c’est ce qu’il est venu chercher.
Il a payé son offrande – comme il se doit – pour être nié, réduit, emballé. Une momification sensorielle, cérémonielle. Il veut que je le transforme. Je vais l’annuler.
Premiers liens, premières pertes
Je commence par les ordres simples. Se déshabiller. Se tenir droit. Se taire.
Je prends mon temps. Les bandes de film étirable se déroulent en un murmure glacial.
Autour des jambes d’abord. Puis du bassin. Puis du torse. Je resserre. Je lisse. Je comprime.
Il devient paquet. Il devient matière. Je le modèle, et chaque tour de bande est une sentence.
Il ne peut plus parler. Ne peut plus bouger. Son souffle devient mon tempo.
Il est devenu meuble
Je le dépose contre le mur. Je passe devant lui comme on passe devant une chaise.
Il m’appartient, et ne sert plus à rien — sinon à décorer mon espace, à incarner mon pouvoir.
Je peux lui marcher dessus. L’ignorer. Le caresser sans le réveiller. Je peux poser une coupe de vin sur sa tête si je le souhaite.
C’est une offrande parfaite : silencieuse, figée, inutile. Et donc précieuse.
Renaissance lente
Quand je décide qu’il a assez attendu, je commence le déballage.
Je tranche le plastique au ras de sa peau. Doucement, pour le faire frissonner.
Il tremble comme un nouveau-né. Il renaît, couvert de sueur, vidé de ses repères.
Il n’est plus rien. Et il m’appartient.
Chaque minute passée dans l’oubli m’est due. Chaque centimètre de film plastique se paye.
Je suis Miss Lilith. Et même le silence se monnaie dans mon temple.
© Miss Lilith – Domaine réservé